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Larry Kramer

Connu pour avoir participé à la création, dès 1982, de la première association d’information sur le sida, Gay Men’s Health Crisis, l’écrivain américain s’est éteint le 27 mai 2020, à l’âge de 84 ans, laissant veuf son mari David Webster.
Il n’était pas un homme facile. Il avait été un jeune homme en colère, en butte aux agressivités de son père, qui ne supportait pas d’avoir un fils homosexuel. Larry Kramer naît le 25 juin 1935 dans le Connecticut. Il a un frère aîné, Arthur, qui deviendra avocat. Après des études à Yale, il trouve un travail dans la société de production  Columbia Pictures. À Londres, puis à New York, il lit des scénarios, les réécrit, est assistant sur certains films et adapte et produit un film sur D. H. Lawrence Women in Love, qui compte quatre nominations aux Academy Awards. Il entre dans la trentaine alors que la libération sexuelle explose, particulièrement dans le monde gay. Kramer est un esprit lucide sinon inquiet. Dès 1978, il publie un roman assez cru et déstabilisant Faggots (que l’on peut traduire par Pédés). Une plongée dans le monde homosexuel masculin, avec ses back-rooms, ses pratiques frénétiques. Un grand succès et des critiques très acerbes. Certains le jugent ambivalent : il met en lumière une communauté qui se sent désignée d’une manière désagréable.
Au moment où les premiers cas de la mystérieuse maladie qui détruit toutes les défenses immunitaires surgissent, Larry Kramer comprend la manière dont elle se transmet. Il s’engage dans un combat très difficile. Les tutelles, politiques et médicales, ne veulent pas entendre grand-chose et la municipalité de New York, sollicitée, fait longtemps la sourde oreille. Kramer se bat contre Ed Koch, alors maire de la ville. Il cofonde dès 1982, avec des amis et le soutien de la société d’avocats de son frère, Gay Men’s Health Crisis. Il a un tel caractère qu’il a été exclu de l’association qu’il avait initiée. En 1987, il fonde ACT UP. Il le disait au New York Times, non sans amertume, en 1994 : « J’ai appris que ce qui est vraiment nécessaire pour attirer l’attention dans ce pays, c’est d’être extrême. »
On reproche bien d’autres choses alors à Larry Kramer et, notamment, ce qui fonde pourtant sincèrement son inquiétude, le rapprochement qu’il établit entre l’aveuglement sur la Shoah et l’inaction concernant le sida. Beaucoup ne peuvent entendre que le refus plus ou moins conscient des autorités, pendant la guerre, de comprendre ce qu’il se passait en Pologne, en Allemagne, dans les camps d’extermination, soit comparable au refus d’admettre, dans les années 1980, la gravité tragique de la nouvelle maladie. Kramer, auteur à succès de romans et de pièces, aura consacré l’essentiel de son temps et de son énergie à ce combat-là. En guerrier, dans l’intransigeance. La cruauté de la vie veut qu’il se soit éteint alors que sa pièce allait être mise en scène en France. Et au moment même où une pandémie balaye le monde. (Armelle Héliot)

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